L’assaut Final (Jour 6)

Etat des lieux

Matériel : 100 mètres de corde (ramenés par Didier et Bruno hier), 40 goujons, 3 accus de perforateurs chargés, 2 perforateurs, 90 mètres de dyneema et quelques plaquettes.
Nourriture : 12 boites de sardines à l’huile, un peu de pain de mie, quelques barres de céréales et une tablette de chocolat.
Moral : nous ne sommes pas prêt à faire un nouvel aller retour, certains sont au camp avancé depuis  six jours. L’expédition se termine dans moins d’une semaine et après cinq jours passés dans ce canyon personne n’a envie de rentrer avec un gloomy pas fini en travers de la gorge.
Physique : il nous reste peu de réserves, la fatigue se fait sentir, mais nous sommes tous capables de puiser dans nos dernières ressources.
Topographie : en rassemblant toutes les données (gps et altimètres), il nous reste moins de 100 mètres de dénivelés pour jonctionner.
Météo : une perturbation est annoncée aujourd’hui.
Bilan : nos réserves sont limitées, demain matin nous n’avons plus rien à manger, nous n’avons plus suffisamment de cordes pour équiper le canyon en fixe, la distance à parcourir pour réaliser la jonction est raisonnable. C’est aujourd’hui ou jamais, la seule incertitude reste la météo.
Nous avons prévu de faire deux équipes : l’équipe 1 équipera le canyon (en rappelant les cordes des verticales) jusqu’à la jonction, l’équipe 2 transformera l’équipement en fixe des jours précédent en équipement rappelable et récupérera les cordes. Cette stratégie est la seule possible mais augmente considérablement l’engagement de la course : il n’existe aucun échappatoire dans ce canyon et une fois la première corde récupérée la seule issue possible pour l’ensemble de l’équipe sera la réalisation de l’intégralité du canyon.
L’équipe 1 se lève à sept heure et la motivation est là, quelques nuages se forment sur le glacier mais rien d’alarmant pour l’instant.
La pluie au mauvais momentPetit déjeuner : un sachet de thé pour deux, une poignée de flocons d’avoine, un peu de miel, c’est frugal mais on verra plus tard pour la gastronomie… Trente minutes plus tard le ciel s’obscurcit et les nuages laissent échapper les premières gouttes, nous sortons les bâches et patientons. Nos espoirs s’amenuisent, mais il faut attendre, le temps peut encore se lever. Vers dix heures la pluie cesse, les niveaux d’eau n’ont pas augmenté, un bout de ciel bleu apparaît. C’est maintenant ou jamais, les sacs sont prêts l’équipe 1 est partie.

Équipe 1 : Bruno, Anthone, Thomas et Simon

Excepté une petite blague, la montée, la traversée du bush, la descente de l’éboulis et le passage au vestiaire se sont déroulés dans un silence reflétant la concentration de chacun. Nous attaquons la descente du canyon avec le même silence, nous avons tous les quatre l’espoir de réussir à descendre ce canyon exceptionnel mais nous avons aussi pleinement conscience des difficultés qu’il nous reste à franchir. Nous savons qu’il n’est plus possible de rebrousser chemin, l’engagement est total, la seule issue possible est devant nous.
soiree mousseNous retrouvons la dernière corde posée par la dernière équipe de la veille. Nous oublions la pression maintenant c’est à nous de jouer. Simon commence à équiper, les rappels ne posent pas de problèmes, mais en bas nous prenons pied sur le bord d’une vasque totalement émulsionnée par l’eau de la cascade qui se jette à pleine vitesse au milieu de ce bassin. Il faut traverser, nous n’avons pas le choix, encordé Simon s’engage, se bat contre un drossage puissant et prend pied de l’autre côté de la vasque. Nous plaçons une corde pour sécuriser le passage de la deuxième équipe et soufflons un bon coup. Nous retrouvons le sourire après avoir franchi efficacement ce premier obstacle. Sans traîner Bruno s’attaque à la cascade suivante pendant que nous dégustons le repas de midi : au choix comme depuis quatre jours sardine à l’huile, sardine à l’huile ou sardine à l’huile… Encore une cascade derrière nous, la dynamique est toujours présente ! Thomas passe à l’action en posant une main courante interminable de plus de vingt mètres indispensable pour éviter un siphon d’une violence impressionnante. Le rythme est bon, l’ambiance se détend d’heure en heure. On le sent bien, et notre pré-sentiment se confirme : Thomas vient de voir la corde de la jonction au fond de la gorge. Nous laissons échapper un cri de joie. Il nous reste une cascade à équiper et notre contrat sera rempli. Nous regardons derrière nous, impatients d’apercevoir dans le rétro le reste de l’équipe chargé du déséquipement.

Le même jour dans l’équipe 2 (Didier, Alexis, Jérémie, Alain, Sandy, Gilles)

10 heures, l’équipe part du camp. L’ambiance est incertaine : d’une part, on va enfin mettre sa fessée à Gloomy, mais d’un autre coté et la météo est incertaine. Nous ne sommes pas sûre de vouloir faire confiance aux prévisions locales …
 Sandy au dessus d'un des nombreux siphonsOn attaque la marche d’approche, le mois qu’on vient de passer commence à vraiment se sentir dans les jambes : on râle une fois de plus contre les locaux qui n’aiment pas les virages et font des sentiers « droit dans le pentu !! ». Aux alentours de midi, on est au départ du canyon. On met en place la stratégie d’attaque pour avancer efficacement dans Gloomy tout en modifiant l’équipement en place afin de rappeler le plus de cordes possible. Une pluie commence à nous arroser, nous nous demandons si on ne manque pas un peu de prudence … Après de longues réflexions, nous convenons de manger là et de prendre une décision après le repas : s’il pleut toujours, nous partons dans le canyon sans toucher l’équipement en place, si la pluie cesse, nous rappelons les cordes mais ne perdons pas de temps.
Après le repas, le ciel se dégage, la corde au dessus de nous est rappelée : « alea jacta est »
Nous descendons tous dans le canyon au lieu dit « le vestiaire » afin de nous mettre en uniforme tandis qu’Alain reste derrière pour récupérer la dernière corde de l’accès.
Une fois tous réunis, nous nous organisons pour gagner du temps au déséquipement. Les 110 mètres de cordes précédemment rappelés sont donnés aux porteurs de néoprènes congelés, afin qu’ils puissent se réchauffer en galopant devant rejoindre le premier groupe.Le skate
Nous avançons en rappelant les cordes les plus faciles à récupérer et laissons en place les pendules et les mains courantes trop aériennes …
Arrivés au terminus de la veille, l’équipement est déjà prévu pour rappeler les cordes, c’est donc plus rapide. Nous passons la cascade « Jacques Ouzi » et restons ébahis par la violence de sa vasque … Nous continuons notre progression rapidement tout en continuant la topographie de la veille.

La jonction

Dans l’équipe 1 Anthony prend le relais au perfo en opposition au dessus d’une cascade bouillonnante il met en place une main courante qui nous permettra d’accéder à la dernière cascade et d’effectuer cette jonction tant espérée. Nous attendons l’équipe 2 « s’ils arrivaient maintenant, ce serait parfait… ».
Il ne nous reste qu’un bassin à traverser, Anthony plonge, se bat contre le courant pour éviter un drossage puissant. Il nage, ne lâche rien, ça passe juste mais ça passe, il saisit la corde rouge : la jonction est faîte !!! Au même moment nous entendons un cri de joie derrière nous,   les déséquipeurs sont là !!! C’est magique, toute l’équipe est maintenant réunie.
La jonctionNous plaçons un rappel guidé pour sécuriser le passage et nouons notre corde orange à la corde rouge en place. Ce nœud est hautement symbolique pour nous tous, c’est gagné il ne nous reste qu’a enchaîner des obstacles que nous connaissons. Embrassades, félicitations sans retenues cet instant tant attendu restera gravé dans nos mémoires. Il est dix huit heures, nous sortirons avant la nuit. L’ambiance est joyeuse, nous avons enfin « mis sa fessée » à Gloomy. On n’aurait pas pu trouver mieux pour conclure cette superbe expédition.La vie au camp avance
Cette joie partagée nous accompagne dans la descente des dernière cascades (le Black Hole, le Skate…), on se régale !
Nous rentrons au camp avancé, tous sur notre petit petit nuage : on l’a fait !!! Nous devons cette réussite collective à la cohésion sans faille de notre équipe.
Vous connaissez déjà le menu de ce soir : riz fromage bien sûr et nous trinquerons avec un bon verre de thé !!!

Le retour à la civilisation (jour 7)

7h00  première attaque des sandfly, pas besoin de réveil !
Vite un petit feu, nous brûlons nos dernières cartouches de gaz, plus de pain, mais il reste des galettes de riz et un peu de miel, petit déjeuner frugal qui nous motive à partir rapidement.
Matukituki valley
Dur dur de ne rien laisser, les sacs se remplissent pour finalement déborder de cordes, de gamelles, de bâches, mais rien ne restera. Les jeunes devancent les « quinquas » sur le chemin du retour. Nous arrivons tous affamés aux véhicules aux alentours de 13h00. Il reste une heure de piste interminable en tôle ondulée avant de pouvoir faire quelques courses sur Wanaka.
Super pique nique sur la plage (fruit frais entre autre!), sans sardine ni thon, petite sieste sur la pelouse et nous rentrons sur notre camp de base à Makarora  .
Bière et cidre coulent à flot avec un repas gargantuesque pour fêter «  la petite fessée » donnée à Gloomy. Un petit billard pour terminer la soirée et Capitaine Morgan va encore sévir pour certains ! Les parties endiablée de « Killer » (jeu de dé) rythmerons notre soirée !

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11 réflexions sur “L’assaut Final (Jour 6)

  1. Bravo, les jeunes ! Cela fait chaud au coeur de sentir votre esprit d’équipe et votre engagement !
    J’ai suivi votre progression et je suis de tout coeur avec vous dans votre joie (pas dans l’effort).
    JO

  2. Quelle magnifique réussite ! nous avons un drôle de chatouillis au creux de l’estomac en vous lisant et relisant, en regardant et re-regardant photos et vidéos. Nous attendons avec impatience le retour de notre Junior pour l’écouter à l’envie raconter vos exploits. Merci à tous.

  3. Quel suspense ce dernier jour de Gloomy, c’était palpitant et en voyant le noeud de la jonction on avait envie de sauter en l’air et d’applaudir devant notre ordi !!! Bravo à tous et merci de nous avoir fait vivre cette aventure presque en direct. Thomas, j’espère qu’on pourra ce capter à Angoulème entre 2 trains.

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